jeudi 8 mai 2008

Les entorses au règlement, volume 3 : la paranoïa politique

Aujourd'hui, le président de la République française, Nicolas Sarkozy, a encore engendré une nouvelle polémique. En s'en prenant à cinq organes de presse (dont l'AFP, Marianne et l'Express), accusés de ne pas avoir relayé suffisamment une affaire judiciaire concernant Ségolène Royal, le Chef de l'Etat s'est posé à la fois en donneur de leçons, mais aussi en grand paranoïaque (ces deux attitudes ne sont pas nouvelles...). Ce procédé n'est pas sans rappeler les plus basses manoeuvres de l'extrême-droite, et particulièrement de Jean-Marie le Pen, qui dénonçait la collusion communisto-socialo-centro-droitemollisto-judéo-maçonnique l'empêchant d'exprimer ses idées aux Français. En se plaçant en victime, Sarkozy poursuit donc avec talent la voie d'un de ses anciens maîtres, et en appelle aux sentiments compatissants de l'opinion publique. Cette posture apparaît cependant risquée : elle a certes permis au président de faire porter les regards sur son ancienne rivale à l'élection présidentielle, dans une affaire qui n'avait effectivement fait aucun bruit (mis à part quelques diatribes de Raffarin, mais "qui connaît M. Raffarin ?"), ce dont on peut par ailleurs légitimement et effectivement s'inquiéter. Mais c'est bien là le seul avantage de cette sortie faussement hasardeuse. Nicolas Sarkozy, personnage ultra-médiatique, que les médias ont d'ailleurs souvent flatté et caressé dans le sens du poil, ne semble pas avoir compris qu'il n'est plus en campagne, que l'opinion est majoritairement contre lui, et que la thèse du complot ne fonctionne que si l'on n'est effectivement qu'un marginal dans la vie politique. Nul doute, de plus, que les médias insultés se feront un plaisir de répondre, et que cracher dans la soupe du Landerneau journalistique ne peut que se finir tragiquement : c'est là finalement le lot de tous les "chouchous" médiatiques, qui tôt ou tard paient leur gloire passée. A contrario, il faudrait cependant que certains médias restent à la solde du petit Nicolas. Dans le cas contraire, il aurait alors des armes, cette fois réelles, pour dénoncer les méchants qui s'acharnent sur lui. Au vu des pointes du journalisme politique dans notre pays (PPDA, Arlette Chabot, Michel Drucker) nous n'avons néanmoins guère de soucis à nous faire.
Mais il y a mieux.
Non seulement le président s'attaque à la presse, mais il s'en prend également à son prédecesseur, instaurant pour le coup une véritable rupture. Les accusations portées contre Jacques Chirac par Nicolas Sarkozy (se moquant des "21 années" qu'il avait mis à se faire élire et raillant la "réforme et demie" de deux septennats qui se seraient terminés après les grèves de 1995) sont le fruit d'un homme profondément méprisant pour celui qui l'a lancé en politique, comme si il fallait par cet acte "tuer le père", puis qu'il trahit honteusement en 1995, rejoignant le Grand Turc avec le succès que l'on sait. Elles traduisent aussi la conception du temps de notre président, qui est toujours dans l'action présente, sans considération aucune pour le passé ou l'avenir. Elles sont enfin le résultat de cette idée profonde et fausse de "rupture" d'un homme dont le parcours politique a suivi pendant trente ans celui de l'idole déchue. Pire, par ces accusations grossières, Nicolas Sarkozy nous rend Jacques Chirac sympathique, et on en viendrait presque à regretter un incompétent magouilleur...Même les membres de la majorité ne suivent plus leur Guide...

On dirait que Nicolas Sarkozy fait tout pour ne pas être aimé, se posant en martyre médiatique, lynché par des fouille-merdes qui ne connaissent rien à la vraie vie. Le président "mal-aimé", se sacrifiant pour l'amour du bien public, incompris mais certain de la voie à suivre...Il y a du Robespierre là-dedans (les deux portaient d'ailleurs des lunettes de soleil), à la différence près que Maximilien oeuvrait réellement pour la vertu et le bonheur commun, que je préfère Arras à Neuilly, les redingotes, chemises à jabot et bas de soie aux costumes trop chers et aux chaussures à gland...Et surtout que je vois mal Bertrand, Copé ou Dati nous faire un 9 thermidor...

jeudi 1 mai 2008

Les entorses au règlement, volume 2 : les jours fériés

En ce 1er mai, parlons un peu, sans boutons de manchettes, décontractés et guillerets, des jours fériés. Le sujet se rapporte en effet bel et bien à notre thématique dans la mesure où le jour férié est, comme le dimanche, un jour généralement chômé, qui permet toutes sortes de divertissements tels que de regarder des défilés militaires à la télévision [petite incise à ce sujet : nous commémorons tous les 14 juillet non pas la prise de la Bastille en 1789, mais la Fête de la Fédération de 1790, voilà, c'est dit] ou d'aller, dans la joie et la bonne humeur, manger le traditionnel poulet rôti du dimanche chez mamy Yvonne.
Le jour férié introduit un dérèglement dans les habitudes et les pratiques sociales hebdomadaires qui est préjudiciable à la bonne santé économique (comment imaginer que des travailleurs français osent chômer lorsqu'il faudrait que nous tous, courageux et fiers artisans de la mise au travail de notre pays de feignants, cheminots, profs, fonctionnaires en général (nos amis représentants de l'ordre mis à part), participions à la grande bataille de l'ultra-libéralisme et de la compétition ? Croyez-vous, maigres oisifs, que l'ouvrier chinois de 10 ans s'arrête de travailler les jours fériés ?), psychique (le traumatisme bien connu du oufc'estlafindelasemaine/etmerdec'estlareprise est en effet répété deux fois dans la même semaine ; comment survivre psychologiquement à un jour en tous points semblable au dimanche lorsque l'on sait que quelques jours plus tard ledit dimanche arrivera ?) et sociale (qu'est-ce donc que tous ces gauchistes assemblés dans leur grand-messe du 1er mai, le bouquet de muguet dans une main et la faucille dans l'autre ?). Imaginez, indolents personnages, le désarroi de notre Bien Aimé Président et de Ses Bras (très à) Droit(e)s...
Et que dire lorsque, comme cette année, le jour férié permet un "pont" ? Songez, vils paresseux, que cette semaine, certains ne travailleront que trois jours sur sept. Cet état de fait est scandaleux. Il l'est d'autant plus lorsque les gouvernants s'amusent à jouer au yoyo avec les jours fériés, comme le lundi de Pentecôte chômé...euh...non, travaillé...euh non chômé cette année en est la preuve.
Et pourtant...souvenons-nous que sous l'Ancien-Régime, on comptait plus de soixante à soixante-dix jours fériés !
Conclusion : courons au bois ramasser du muguet avant que le gros Bertrand ne s'asseoie dessus.