vendredi 18 avril 2008

Les entorses au règlement, volume 1 : la Belgique

Comme chacun sait, et selon le bon vieil adage, les règles n'existent vraiment que pour être contournées. Le postulat de départ de ce blog était de ne poster des messages que le dimanche, si possible l'après-midi, pour illustrer en texte le profond désarroi qui nous envahit tous lorsque ce jour fatal sonne à notre porte (ce qui se situe généralement entre le samedi et le lundi). Oui mais ! Il est certains dimanches où l'oisiveté laisse place à la ripaille collective (les repas de famille) ou à une quelconque activité qui rend totalement impossible la réalisation d'un article. Que faire ? laisser dépérir cette oeuvre magistrale ou lui redonner vie, dans un élan grotesque ? J'ai choisi la seconde solution. A partir d'aujourd'hui, je déclare comme nulle et non avenue la tacite règle que je m'étais imposé, à savoir de ne rédiger que les dimanches. J'admets que cette entorse ne peut qu'entâcher le magnifique concept qui donnait vie à ce blog, mais j'assume pleinement cet acte révolutionnaire : oui, je parlerai du dimanche un autre jour que le dimanche.
Après cette trop longue introduction, venons-en au fait. Quel sujet aborder un jour de semaine pour parler du dimanche ? Il fallait trouver quelque chose d'imbécile, de bénin, d'anecdotique, de vide, de creux, d'absurde, bref, de dominical. Alors quoi de mieux que ce pays du dimanche qu'est...la Belgique ?
J'ai une sympathie et une admiration profondes pour le plat pays. Au-delà de la poésie des terrils de Charleroi et des usines de la Louvière, du pavé luisant sous la pluie, du waterzoï et de la bande-dessinée, d'un accent inimitable et de gloires du vélo, la Belgique représente finalement tout ce que la France aurait voulu être et ne sera jamais, même dans le Nord de la France, n'en déplaise à certains humoristes qui cultivent sans ambages la caricature du chti sympa-cool-décontracté-qui-ne-crache-pas-sur-le-Picon-Bière-mange-du-Maroilles-au-petit-déjeuner-en-buvant-de-la-chicorée-tout-ça-avec-un-accent-à-couper-au-couteau. En passant, je suis un militant actif de la reconnaissance de cette région, mais nous faire croire que le Chnord est formidable, qu'il n'y a que des gens sympas même si ils sont un peu brutes au départ, qu'il ne fait pas si mauvais que ça à Lens, que tous les postiers sont un peu alcooliques mais attachants...Fut un temps, on appelait ça la discrimination positive, maintenant on appelle ça la promotion régionale...
Revenons cependant à nos Manneken-Pis. La Belgique existe officiellement depuis 1830, mais n'a aucune existence réelle et tangible : composée de deux "communautés" qui se haïssent volontiers, les Flamands et les Wallons, elle se distingue par cette scission profonde qui la menace depuis sa fondation. Point n'est besoin de rappeler ici les conflits qui opposent ces deux parties, les uns néerlandophones et néerlandophiles, les autres francophones et francophiles. Notons simplement que cette partition linguistique et réellement culturelle n'a fait qu'handicaper ce beau pays au fil des décennies.
Politiquement, comme artistiquement, la Belgique est le pays du surréalisme : Michel Daerden est en cela le digne héritier de Magritte. Elle cultive un certain sens de l'autodérision dont nous sommes, nous Français, bien incapables. Elle est l'un des seuls pays qui ait pu fonctionner sans gouvernement pendant de nombreux mois (ce qui pose d'ailleurs la question de la nécessité d'un gouvernement), dont les dirigeants ne savent même pas pour quelle raison la fête nationale a lieu, lorsque certains se trompent d'hymne national...Ses principaux dirigeants politiques se distinguent mondialement, soit par leur sens inné du spectacle, soit par leur goût vestimentaire qui ferait passer Keith Richards pour un Mormon, soit par leur humour (belge, bien entendu).
Sportivement, elle fut une héroïne de la bicyclette, d'Eddy Merckx à Ghislain Lambert, et compte de nombreux clubs de football comme Anderlecht, le FC Bruges, le Standard de Liège ou la Gantoise (dont je n'ai jamais compris le logo, si ce n'est par la présence d'une forte communauté cherokee dans cette région).
Artistiquement, la Belgique a compté quelques grandes voix de la chanson (Brel, Jean-Philippe Smet), quelques belles plumes de la bande-dessinée au temps du Congo belge mais pas seulement (Franquin, Georges Rémi), quelques historiens célèbres (Tanguy Allard), des acteurs (Benoît Pelforth).
Gastronomiquement, les frites.
Economiquement, les frites.
Culturellement, les frites (et accessoirement Bruxelles).
Religieusement, les frites.
Conclusion : la Belgique est vraiment un pays du dimanche, une fois.